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Chronique de Mr. Alien Brain VS. The Skinwalkers
Paru en 2009

Contexte de parution : Rock&Folk

Sujet principal : Psychic TV
Cité(s) également : plusGenesis P-Orridge, Lady Jaye Breyer P-Orridge, Lou Reed, Syd Barrett, Velvet Underground




Ca commence par une ébauche d’élégie : des échos de délicatesse, des hésitations, quelques étranges cycloïdes, et une magnifique reprise de Syd Barrett, « No Good Trying ». Il y en a une autre, un peu plus loin, du Velvet Underground, « Foggy Notion », où Genesis P-Orridge – singeant outrageusement le jeune Lou Reed – démontre à nouveau ses talents d’imitateur-dégriffeur. C’est d’une tristesse rare, parce que c’est un album de deuil. Lady Jaye Breyer P-Orridge, la muse et moitié de Genesis (ou plutôt son double, puisque, à force d’opérations chirurgicales et implantations mammaires osées, Genesis lui était devenu quasi-identique, accomplissant une autre chanson du Velvet : « I’ll Be Your Mirror ») est morte en octobre 2007 d’une maladie cardiaque non diagnostiquée, peu de temps après la sortie de leur précédent album « Hell Is Invisible… Heaven Is Her/e», un album dans lequel Psychic TV/PTV3 célébrait leur mutuelle transformation pandrogyne : « In Thee Body ». Les conséquences de ce deuil sont indirectement évoqués ici – à travers la voix de Lady Jaye sur « I Am Making A Mirror » – mais son ombre dévore tout. « Trussed » est intense et interminable, porté par un chant toujours aussi martial, même dans la douleur. « The Alien Brain » tourne en boucle. « Have Mercy » chante encore le fondateur du « Temple of Psychic Youth » sur l’inattendu « Papal Breakdance », à travers des mélodies mêlant l’innocence désespérée des comptines cold wave des années 80 et la sape en profondeur des improvisations sixties. L’album s’achève dans un déchirement de chœurs, de claviers et de boucles de guitare : il s’évapore sous le Huitième Climat, au point où ce monde et l’autre se confondent. La plupart des morceaux sont des enregistrements live à la radio – pour l’émission « World Café » sur WXPN-FM Philadelphie. Le groupe n’avait pas joué depuis six mois, depuis que Lady Jaye avait « lâché son corps » (dixit P-Orridge). Les musiciens ont répété une soirée et ont accouché de ce disque, d’une splendeur terrible, à faire pleurer le Diable.