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Le Grand Pan est mort
Paru en 2016

Contexte de parution : Facebook

Présentation :

Texte publié le 22 avril 2016 dans le cadre d'un post facebook au lendemain de la mort de Prince.


Sujet principal : Prince
Cité(s) également : plusFreddie Mercury, John Lennon




Prince c'était l'incarnation parfaite du Dharma : quelqu'un qui faisait exactement ce qu'il aurait du faire ; Charlie Chaplin devenu compositeur d'opéra funk ; le fils d'une déesse de sophistication et d'un animal sauvage. Il suffisait qu'il prenne un instrument dans ses mains et celui-ci se mettait à frémir de plaisir, les claviers s'électrisaient comme des chats, les guitares fondaient comme du chocolat. Et puis il donnait une forme à la maxime classique de l'aristocratie : un homme noble ne commet jamais de pêchés. Il pouvait faire les pires horreurs : les films les plus stupides, la promo de témoin de Jéhovah la plus bas de plafond, les clips les plus vulgaires, les albums les plus indigents et les oeillades les plus lubriques, Prince restait la classe absolue, la beauté suprême de la note déposée toujours au meilleur moment et du danseur qui se retrouve acrobatiquement là où il doit être après avoir failli se rétamer. Elégant comme un tigre et organique comme une plante : une apparition de Prince n'était jamais "déplacée". Un disque, c'était toujours un vase brisé et recollé. Ses morceaux étaient comme des réparations d'ailleurs : réparations de ce que les années 80 avaient de pire - réparations de ce que nos coeurs trop insensibles et nos esprits trop sentimentaux avaient produit de plus médiocre en nous. Il nous prenait là : dans notre narcissisme sentimental et sexuel, le coeur toujours brisé par notre faute, toujours en manque d'héroïsme et de fraternisation, et il nous élevait en nous faisant sourire et en nous faisant danser. "Sometimes it snows in April", "The Ladder", "How come U don't call me anymore", "Another lonely christmas", "Purple Rain", "3 Chains of Gold", "Welcome 2 the Dawn", "1999", "Raspberry Beret", "Condition of the Heart", "She's Always in my Hair", "Strays of the World", "I love U but I don't trust U anymore", "Musicology" : que des hymnes ! Le plus grand compositeur d'hymnes universels depuis John Lennon et Freddie Mercury. Il n'a pas l'air d'avoir été très heureux, mais il devait l'être quand même suffisamment pour ne pas cesser de nous aider à gravir la pente des jours.

Il est parti n'importe comment, c'est sa seule faute, mais il nous a laissé un demi-milliard de chansons pour nous consoler. Il n'est pas vraiment mort puisque, en bon Pharaon, il a laissé une pyramide de musique derrière lui pour qu'on puisse continuer à le solliciter.

Ca fait des années que j'écoute Prince tous les jours ; ce n'est pas demain que ça va s'arrêter.